L’exploration biologique de la fonction thyroïdienne intervient en complément de l’examen clinique. Elle permet de confirmer les situations d’eu, d’hyper, ou d’hypothyroïdie, d’aider à l’enquête étiologique pour préciser l’origine auto-immune, iatrogène, génétique de l’affection, d’effectuer la surveillance de la dysfonction, ou de la pathologie tumorale.
Les hormones et leur dosage
Les dosages présentent actuellement de très bonnes sensibilités et spécificités. Malgré leur grande fiabilité, il existe toujours des causes d’interférences ou d’artéfacts. Il faut donc rester critique devant les résultats. Le dialogue clinicien-biologiste est essentiel.
La TSH
La thyrotropine (TSH) est produite par les cellules thyréotropes de l’antéhypophyse. Celles-ci sont extrêmement sensibles au rétro contrôle par les hormones thyroïdiennes au point que les taux de TSH sont corrélés à ceux de T4 circulante selon une courbe exponentielle : une réduction de moitié de la T4 libre multiplie par 100 la concentration de TSH. Cette relation et ce phénomène d’amplification explique pourquoi, en situation d’équilibre, T4 libre et TSH représentent le même paramètre. Leur dosage conjoint est donc ordinairement redondant. La TSH est beaucoup plus informative que la T4 libre. Une imprégnation légèrement insuffisante par les hormones thyroïdiennes est déjà détectée par une augmentation de la TSH alors que la concentration de T4 libre se situe encore dans les limites de la normale (hypothyroïdie fruste ou « subclinique »). La TSH constitue par conséquent le paramètre le plus précieux pour l’appréciation de la fonction thyroïdienne. C’est « le » paramètre à demander en première intention. Les valeurs de référence admises, en Europe, toutes techniques confondues, sont de 0.4à 4mUI/L.
Les hormones thyroïdiennes : T3 et T4 totales, T3 et T4 libres
La thyroxine (T4) est produite en totalité par la glande thyroïde. Sa concentration est un excellent reflet de la production thyroïdienne. La T4 circule, dans le sang, sous formes libre (0.02%) et liée aux protéines vectrices (albumine, transthyrétine et TBG).
La triiodothyronine (T3) est l’hormone la plus active. T3 et T3 libres sont le reflet de la production périphérique et leur valeur diagnostique dans l’évaluation de la fonction thyroïdienne est limitée.
Les dosages des formes libres ont supplanté ceux des formes totales. Ces dosages actuellement automatisées peuvent présenter des problèmes méthodologiques dans certaines situations cliniques particulières comme la grossesse et l’insuffisance rénale.
Les anticorps antithyroïdiens
Les anticorps antithyroperoxydase (Acanti TPO) : ce sont des IgG dont les taux sont corrélés à l’abondance de l’infiltrat lymphocytaire thyroïdien. Les dosages sont actuellement très sensibles et spécifiques. La concordance entre les trousses est bonne (>90%) bien que des problèmes de standardisation persistent. La prévalence des Ac antiTPO, dans la population générale sans dysfonction thyroïdienne, est de12%
Les anticorps antithyroglobuline(AcantiTg) : L’immunisation se fait conjointement contre la TPO et la Tg. les Ac anti TPO apparaissent plus vite et/ou sont mieux détectés que les Ac antiTg. Donc, dans l’évaluation de l’auto-immunité thyroïdienne, la recherche des Ac antiTg ne doit pas être systématique en première intention. Elle ne sera réalisée qu’en cas de forte suspicion clinique et/ou échographique et devant une recherche dAc antiTPO négative. Seuls 3% de la population présentent des Ac antiTg sans antiTPO détectables (étude américaine NHANESIII).
Lesanticorpsanti-récepteur de la TSH (AcantiRTSH) : Ils se lient aux récepteurs de la TSH.La majorité de ces anticorps se comportent comme des Ac stimulants et constituent un marqueur diagnostique et prognostique de la maladie de Basedow. Dans de rares situations, ils ont une activité bloquante responsable d’hypothyroïdie avec hypotrophie de la glande.Ils étaient jusqu’ici détectés par des techniques d’inhibition de liaison de la TSH marquée à des récepteurs humains ou porcins. De nouvelles méthodes automatisées ou non, avec utilisation d’Ac monoclonal hautement spécifique sont apparues. L’évaluation clinique de ces réactifs est bonne mais la stabilité parfois insuffisante.
Les marqueurs de cancers thyroïdiens
La Thyroglobuline (Tg)
Les cancers différenciés de la glande thyroïde (CDT) sont les cancers endocriniens les + fréquents. Leur incidence s’est accrue ces dernières années sous l’effet d’un dépistage plus actif et d’une modification des pratiques. Le pronostic d’ensemble est favorable. Ces dernières années sont apparus de nouveaux outils de surveillance : l’échographie, la TSH recombinante, la tomographie d’émission de positons, de nouveaux dosages de Tg et d’Ac antiTg , des recommandations européennes et françaises pour la prise en charge des cancers différenciés de souche vésiculaire ont été récemment publiées.
La surveillance biologique des CDT opérés se réalise par les dosages de TSH, d’Ac antiTg et de Tg. Le taux de Tg doit être indétectable. Sa permanence ou sa réapparition signe la récidive ou la métastase. Il est essentiel que la surveillance biologique des patients se fasse dans le même laboratoire.
Les dosages de Tg peuvent être minorés enprésence d’AcantiTg positifs. Il est important, dans ces situations, de suivre le titre des AcantiTg.
La calcitonine (CT)
La CT constitue un marqueur biologique du cancer médullaire de la thyroïde (CMT). La prévalence du CMT est faible (proche de 0.4%). Depuis une dizaine d’années, en Europe, ce dosage s’est généralisé en pathologie nodulaire thyroïdienne optimisant la détection précoce des CMT, le geste chirurgical et la survie. Mais la calcitonémie peut être élevée dans d’autres circonstances que le CMT. La prévalence de ces hyperCT non dues à un CMT a été évaluée à 4.5%. Elles sont soit tumorales, soit fonctionnelles liées à une hyperplasie des cellules C. Les principaux facteurs pouvant influencer un taux de CT sérique sont l’insuffisance rénale chronique, l’hypergastrinémie, l’existence d’une autre tumeur endocrine et letabagisme.
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